
Plus de trente ans après les faits, le «serial killer» qui a traumatisé Los Angeles a pu être confondu grâce à son empreinte génétique.
«Impossible de dire quoi que ce soit. Nous ne savons pas s'il agit seul, s'il est Blanc, Noir, petit, grand, gros ou mince!» avouait, exaspéré et désespéré, le lieutenant Ron Lewis. C'était en décembre 1975. Le corps de Cora Perry, veuve de 79 ans, énième proie en quelques mois du «westside rapist», le «violeur des quartiers ouest» de Los Angeles, venait d'être découvert. Et les rescapées de celui qui tétanise le quartier Wilshire, juste au sud de Hollywood, choquées au plus profond, ne peuvent livrer que des descriptions contradictoires.
La seule certitude: il viole puis étrangle des femmes âgées - Lucy Grant avait 92 ans -, Blanches en général, de milieu très modeste, parfois invalides. «Et il avait un rituel très curieux, précise Stéphane Bourgoin, spécialiste des tueurs en série. Il recouvrait le visage de ses victimes d'un drap ou d'une couverture. Les criminologues appellent ça le undoing, comme s'il voulait annihiler son acte.»
Le «westside killer» est l'auteur de 30 meurtres au bas mot. En deux phases: la première au milieu des années 1970, puis entre 1983 et 1989, cette fois dans la région de Claremont, à 48 kilomètres à l'est de la mégapole. Après quoi, il semble s'être volatilisé et son identité perdue à jamais.
C'était sans compter sur les incroyables avancées scientifiques. Depuis 2001, la police de Los Angeles se constitue peu à peu une base de données, récoltant l'ADN de tous les délinquants sexuels. En octobre dernier, c'est au tour de John Floyd Thomas, septuagénaire, employé dans une compagnie d'assurances, de livrer sa salive. Il n'a jamais figuré sur la liste de serial killers potentiels, mais a été emprisonné à plusieurs reprises pour tentative de viol et viol.
Il y a un mois, le 31 mars, John Floyd Thomas, 72 ans, est arrêté dans son appartement. Confondu par son ADN, il est l'auteur des meurtres d'Ether Sokoloff (68 ans) et Elizabeth McKeown (67 ans), respectivement commis en 1972 et 1976. Très vite les inspecteurs de l'Unité des cas non résolus font le lien avec quatre autres meurtres de femmes. «Et c'est la pointe de l'iceberg», a déclaré aux médias Charlie Beck, chef de la police de Los Angeles. John Floyd Thomas est aujourd'hui plus que fortement soupçonné d'être le plus grand serial killers de la Cité des Anges.
Comment tenter d'expliquer ces crimes abjects, compulsifs, visiblement sans aucune limite? «Ce qui est frappant avec lui, c'est toutes ces cassures dans l'existence. Il n'a aucune carrière structurée, a été marié à cinq reprises», précise Stéphane Bourgoin, qui a parlé avec 57 tueurs en série, et s'est évidemment penché sur le cas du «westside rapist».
«Le fait de s'attaquer à des veilles femmes n'est pas si étonnant, poursuit-il. Les tueurs en série sont généralement des lâches qui s'attaquent à plus faible.» Des proies faibles, veuves, et souvent isolées socialement, ce qui rendait l'enquête d'autant plus difficile à l'époque. «Comme il y a meurtre mais aussi viol, on peut penser qu'il y a une forme de vengeance vis-à-vis de femmes âgées.» Membres de sa famille? D'une personne qui l'a maltraité? L'enquête ne fait que commencer.